Témoignage de Murielle Lefebvre, andragogue (pédagogie pour les adultes) et pédagogue, qui nous explique la différence entre déverser ses connaissances et former des adultes.
Cette semaine, je me retrouve de « l’autre côté de la barrière », si je puis dire : apprenante dans une formation continue, durant une semaine sur un thème scientifique médical.
Nous sommes neuf apprenants, venant d’horizons plus ou moins différents, puisque la plupart sont déjà dans un métier proche du soin ou/et des plantes.
La salle est organisée avec un grand rectangle de tables et chaises et il y a deux formateurs à plein temps (comme deux éducateurs montessori dans une classe pour les enfants). Nous restons tous assis, derrière les tables, et nous prenons des notes.
Au mur, il y a un petit tableau veleda et un grand écran sur lesquels le formateur respectivement, trace de temps en temps un schéma ou projette l’écran de son ordinateur.
Je m’aperçois que l’environnement est le même quelque soit le thème présenté, car je suis déjà venue une semaine dans les lieux, pour une autre formation. La salle est décorée de plantes séchées dans des bocaux de verre et de livres, mais rien ne rappelle le thème spécifique de la semaine.
Aucun objet, aucun poster, aucun livre ou documentation sur le sujet traité ne seront présentés ou proposés. Aucune référence de livres ou auteurs ne sera suggérée.

D’entrée, les objectifs d’acquisition hebdomadaires à atteindre ne sont pas clairement définis.
Le programme, qui a été envoyé par email, ne sera pas respecté et le formateur principal annonce chaque jour, des contenus que ne sont pas abordés !
Aucune conclusion de fin de journée n’est effectuée, qui permettrait de résumer des connaissances acquises et puis de faire le point ensemble. Aucun feed-back, ni sur les incompréhensions, ni sur les apprentissages n’est fait.
Le point culminant se déroulera le 5è et dernier jour, quand le formateur nous laissera, tous ensemble, durant 120 minutes, dans l’incapacité de résoudre le cas clinique complexe qu’il nous soumettra.
Aucune des neuf personnes ne sera capable de résoudre la question est même ensemble nous échouerons lamentablement ! Quel désastre, nous sommes tous dans le malaise. Le formateur devrait se poser la question sur le fait qu’aucun apprenant n’a compris ce qu’il explique depuis 5 jours, mais il n’en est rien.
Heureusement, j’ai appris sur la périphérie du thème, si je puis dire. Mais le goût de mes apprentissages est amer.
Les autres apprenants ont vécu la même frustration que moi à ne pas réussir, in fine et au contraire, se rendre compte de ne pas avoir compris.
Aucune personne ne dira clairement ce qu’il se passe et aucun bilan oral de groupe ne sera effectué à l’issue de la formation.
Vous l’avez compris, je ressors frustrée de cette formation. C’est surtout parce que je suis concernée par la forme, en tant que formatrice, andragogue et consultante.
Le métier de formateur, s’il est reconnu, est un ensemble de connaissances et de compétences professionnelles que je vais lister ci-après.
« N’est pas formateur qui parle d’un sujet qu’il maitrise. »
Je suis également concernée par le fond, car j’estime avoir échoué à comprendre. Heureusement que mes outils de coach du mental sont dans ma malette de survie psychologique pour conclure positivement mes 5 jours !
Déverser ses connaissances ne veut pas dire être formateur.
Et assister à une session de la sorte ne veut pas dire apprendre.
Comment faire alors pour être un vrai formateur et pour qu’un apprenant apprenne vraiment ?
La notion d’androgagie active répond à ses deux questions.
De quoi s’agit-il ?
Tout d’abord, être andragogue, c’est connaître la façon dont les apprenants fonctionnent lorsqu’ils apprennent. Cela fait plus de 100 ans que sont observées et documentées les notions d’apprentissage de l’être humain, ainsi que les notions de psychologie sociale.
Ensuite, c’est avoir réfléchi sur le contenu de formation, et plus précisément :
- se fixer des objectifs à atteindre comme « A l’issue de la formation, les apprenants doivent avoir compris et être capables de…. »
- mettre en place un environnement et une ambiance adaptés (ref la philosophie Montessori) : « je prépare ma salle et le matériel afin qu’ils soutiennent les apprentissages tout au long du cursus. »
- décider de la démarche et des outils andragogiques comme « nous utiliserons un jeu de rôles, une carte mentale géante, des présentations en duo puis des simulations, un cas clinique dirigé, etc. »
- répondre aux questions individuelles mais ne pas délaisser les autres apprenants pour autant, ni le programme
- être dans une posture perpétuelle de feed-back durant la session et s’assurer de l’atteinte des objectifs, à la fin de la formation
Etre andragogue, c’est un métier. Il faut donc s’y former.
Etre andragogue demande des postures d’observation et d’écoute.
Des apprentissages sur les démarches, les outils et les méthodes sont indispensables, car il s’agit de guider un apprenant adulte, selon sa singularité, une tâche sensible et humainement très aboutie et ceci ne s’improvise pas.
Au sein de l’Academie TMF, l’équipe pédagogique réfléchit en permanence à ses questions d’apprentissage car nous avons à coeur, en tout premier lieu, que l’apprenant soit dans une position confortable pour s’enrichir, progresser et prendre confiance pour agir professionnellement.
Ce n’est pas parce que je sais faire du bon pain que je suis capable de transmettre comment faire du pain.
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