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Il n’existe pas cinq théories des apprentissages, mais deux seulement
Quelles sont les théories d’apprentissage ? Je vous propose de re(visiter) cette question fondamentale à laquelle nous pouvons réfléchir en nous posant une question basique : Comment un humain apprend-il ?
Dans un premier temps, nous nous accorderons sur les mots et les définitions les plus précises qui ont été données aux théories d’apprentissage, par leur concepteur si possible. Puis, nous donnerons un exemple concret d’apprentissage et enfin nous conclurons par le fait qu’il n’y a pas cinq mais seulement deux théories d’apprentissage humains.
Les théories d’apprentissage
Commençons par revisiter la définition d’une théorie (dans le sens processus) d’apprentissage, car je vois, lis et entends beaucoup de professionnels ou non professionnels qui ne font pas de différence entre théories d’apprentissage et méthodes pédagogiques. Alors que ces dernières découlent des premières.
Vous remarquez que dans le monde de l’Education, comme dans d’autres secteurs d’ailleurs, les mots n’ont plus de signification certaine, inamovible. Chacun argumente de son utilisation personnelle des termes et quand je pose une question sur la définition d’une expression, on me répond que l’usage prendrait le dessus sur la définition ! Il en est ainsi actuellement, et c’est dommage car la communication est rendue plus difficile si on appelle un chien un chat et vice-versa, certes ce sont des animaux domestiques dans lesquels l’homme investit de plus en plus au sens propre comme au sens figuré, mais pour autant ils ne sont pas du même genre et donc pas de la même espèce, biologiquement parlant.
Vous connaissez l’autre exemple avec l’utilisation généralisée du mot technologie à la place du mot technique, ou encore l’exemple galvaudé de la phrase « Partage-moi ton document » au lieu de « Partage ton document avec moi », ou encore le dernier exemple -qui m’énerve je dois l’avouer dont voici une illustration récente avec un journaliste français des JO à Paris entendu hier sur une chaîne télévisée : « j’ai été au stade » au lieu de « je suis allé au stade ». Même si le verbe aller est un des verbes les plus difficiles et irréguliers de la langue française, en tant que journaliste, je pense que des savoirs minimum s’imposent.
Poursuivons sur les théories d’apprentissage.
Il semble qu’il en existe une classification « académique » dont voici un résumé en image ci-dessous (désolée je n’ai plus la source). C’est repris par les uns et les autres sur youtube, avec des variantes, des ajouts, des oublis… Ces différentes interprétations ont déclenché ma réflexion. En réfléchissant, je constate que le connectivisme n »est pas une nouvelle théorie, puisque les composantes de base, restent les mêmes, à savoir qu’il y a un apprenant et un enseignant (virtuel ou non). Dans le connectivisme, il y a une posture de l’apprenant décrite comme plutôt active (encore faut-il s’entendre sur cet adjectif) et une posture de l’enseignant avec certes les deux nouveautés suivantes grâce aux techniques contemporaines (et non pas technologies si vous avez retenu l’information ci-dessus -)
1- un enseignant virtuel type robot qui diffuse des leçons
2- des leçons qui peuvent être à distance, synchrones ou asynchrones
Quoiqu’il en soit, pour ma part, je n’en fais pas une théorie d’apprentissage supplémentaire pour autant. Quant à la 4e théorie, je pense qu’elle est un sous-théorie de celle du constructivisme.
En définitif, selon moi, les théories d’apprentissage répondent à la question : comment un humain apprend-il ?
Et là, il n’y a que 2 réponses possibles :
- Il peut apprendre par lui-même (en regardant, en lisant, en s’exerçant),
Par exemple, je plante une pomme de terre dans mon jardin et j’attends de voir ce qu’il se passe. - Il peut apprendre des autres (qui lui enseignent, qu’il voit faire ou qu’il écoute, etc.).
Par exemple, j’écoute ma voisine m’expliquer comment elle cultive ses pommes de terre.
L’innovation, terme très usité actuellement, n’est possible ni dans les théories d’apprentissage ni dans les pédagogies (nous en avons déjà donné des explications et définitions sur ce blog), en revanche elle est possible dans les outils pédagogiques, c’est-à-dire la forme de l’apprentissage proposée aux apprenants. Et c’est bien ce qui est repris dans la 5e théorie, le connectivisme, la forme et non le fond.
Nous apprenons grâce à des informations recueillies avec des outils numériques, certes, mais dans ce cas c’est une forme N°2 de ma nomenclature ci-dessus, cad qu’on apprend des autres (une ou plusieurs personnes) qui diffusent leurs informations sous une forme électronique.
Prenons un exemple concret.
Pour apprendre par coeur les tables de multiplication, il faut les répéter et les répéter afin d’activer les neurones et leurs connexions de telle sorte qu’ils « impriment » notre mémoire à long terme. C’est-à-dire que même à 74 ans, un homme ou une femme répond immédiatement 20 à la question 4X5.
Il ou elle est passée, tout au long de sa vie par plusieurs théories d’apprentissage : behaviouriste (répétitions avec récompense ou punitions pour renforcer les apprentissages) cognitive (manipulations de matériels ou vidéos) et constructivisme (assimilations et accomodations piagéennes selon des étapes de développement de l’individu). Mais en définitif, il ou elle a appris soit seule (en récitant tout haut les tables dans sa chambre durant son enfance), soit avec des outils (manipulations de perles colorées montessori par exemple) et des acteurs (enseignants ou parents l’interrogeant).
Il ou elle a bénéficié de méthodes pédagogiques (Montessori ou Steiner) ou pas, d’outils pédagogiques différents (les tables montessori, des chansons, des gestes, des couleurs, des carnets à remplir, du matériel spécifique, des jeux didactiques, etc…) Quoiqu’il en soit, le processus d’apprentissage reviendra au même : le cerveau enregistre les tables de multiplication (sons, images, signes, gestes ou situations) et est capable de les faire revenir instantanément quand c’est demandé (principe de l’évocation en neuropédagogie).
Pour conclure, je dirais qu’en tant que pédagogues, nous devons définir les termes « modes d’apprentissage, théories d’apprentissage ou modèles d’apprentissages » tout comme « méthode pédagogique, courant pédagogique, mouvement pédagogique, pédagogie tout court » car sinon nous nous éloignons les uns des autres par manque de compréhension et langage commun.
La langue française a un mot pour définir chaque infime partie, d’une sous-partie elle-même partie d’un tout. La connaissance et le choix du mot juste sont donc importants pour se parler, s’écouter et donc se comprendre et avancer ensemble.
Construire notre propre représentation du monde, la plus fine, factuelle et proche du réel, permet de s’y épanouir. Elle passe par le langage et la réflexion donc l’utilisation de notre cerveau (intelligence).
Sans démarche pédagogique l’apprentissage est impossible
Récemment, je suis allée à une séance de botanique animée par un botaniste très pointu sur le sujet. Une petite dizaine de personnes étaient présentes (dont une famille avec deux fillettes) ce soir-là.
Il y avait des plantes fraîches à observer, des diapositives à regarder, des plats cuisinés à goûter. Un beau programme concret et sensoriel en perspective !
J’en suis ressortie joyeuse mais sans grande progression en botanique hélas, et Dieu sait combien je la recherche.
Je vais expliquer pourquoi sans démarche pédagogique l’apprentissage est impossible.
Alors que le sensoriel était au rendez-vous, nous ne pouvions pas repartir avec beaucoup de connaissances supplémentaires car sans structure pédagogique on ne transmet pas efficacement.
Tout d’abord, le formateur n’avait pas d’objectifs pour cette séance.
Amener des plantes à découvrir, toucher, gouter, n’est pas un objectif.
« Que chacun reparte avec trois nouvelles plantes reconnues du point de vue des feuilles (il n’y avait pas de fleurs), de l’odeur et du nom » en est un.
Et pourtant le botaniste avait préparé sa salle, son matériel, sa documentation et il maîtrise le sujet avec brio.
Que s’est-il passé ?
Sa séance était structurée en trois temps
1) Des plantes à deviner
Il pose sur les tables des plantes toute fraîches cueillies, et des clés de détermination (livres) et autres supports professionnels théoriques.
Chacun se débrouille avec ce qu’il a devant lui. Parmi l’assemblée des enfants et des adultes débutants en botanique.
Suggestions pédagogiques et didactiques pour cette partie :
- Au début, le botaniste décrit une plante
- Faire décrire les plantes par une personne, pour réviser le vocabulaire
- Demander à une autre de faire la même description
- Reformuler, raconter des anecdotes et afficher l’information écrite qq part.
- Donner les échantillons à ceux qui repartent.
Moi-même, en aidant à ranger la salle et en mettant les plantes une par une dans le bac, j’ai tenté de dire leur nom. Heureusement que je n’avais pas d’évaluation à passer -)
2) Le botaniste projette sur le mur des photos de plantes :
Il n’y avait que la photo de la plante, aucun soutient écrit du nom afin de bien le voir, l’entendre (nom vernaculaire puis nom du genre et de l’espèce en latin) et de le mémoriser.
Les explications sont sans structure, on bavarde sur le lieu, les anecdotes… c’est très convivial mais pas du tout didactique.
A aucun moment, il y a vérification des acquis ou validation.
Suggestions pédagogiques et didactiques :
Afficher après la photo, une page avec le nom en clair, quelques infos, une carte de géolocalisation, etc…
A la fin proposer un jeu et représenter les photos, et compter le nombre de réponses.
Sans répétition, on n’apprend rien.
3) Pour les recettes à découvrir
Suggestions pédagogiques et didactiques :
Le formateur demande à ce que la recette soit notée au tableau, sinon, noter l’email de la cuisinière pour ceux qui seront intéressés.
Préciser les bienfaits et les risques de consommation des plantes citées. C’est très important de redire à chaque fois combien les plantes peuvent être autant dangereuses que bénéfiques.
En définitive chacun repart très peu enrichi des expériences et connaissances des autres. Même dans une salle de 10 personnes, on a beaucoup à partager. J’ai discuté avec ma voisine qui s’avère être un éleveuse de spiruline dans sa propre ferme. Je lui ai posé plein de questions, c’était fort intéressant de mon point de vue, même si nous n’étions pas dans la botanique.
On aurait pu afficher chacun ses coordonnées et centres d’interet botaniques.
Il n’y a pas eu de conclusion ni évaluation de fin de séance et aucune suite ne nous est donnée pour progresser.
Transmettre demande une réflexion précise sur cet acte.
C’est un environnement, une ambiance, un parcours défini à l’avance, même si on laisse une grande liberté à l’apprenant,
En l’occurrence qu’est-ce qui aurait pu être mis en place ?
Pour commencer il y a une difficulté liée à l’hétérogénéité du public (la cible) en connaissances botaniques.
Personnellement je tire profit de cette situation en demandant à ceux qui savent de se mettre avec quelqu’un qui ne sait pas. Je leur demander d’expliquer aux autres et je propose à certains de réexpliquer ce qu’ils ont compris (genre d’évaluation à chaud).
Etre pédagogue, c’est comme être coach mental, cela s’apprend. Transmettre des connaissances demande des dons d’observation et d’écoute et beaucoup d’apprentissage sur les démarches, les outils et les méthodes.
Ecrire, lire, dire, toucher, classer, comparer sont des gestes liés aux apprentissages.
Je terminerai pas des pistes d’observations et de travail didactique sur les plantes, accessibles aux petits et aux grands :
Pour chaque plante
Toucher la plante les yeux ouverts, les yeux fermés, la sentir
La nommer
Nommer ses parties
Nommer son genre et espèce
Nommer sa famille
Raconter une histoire sur la plante, son utilité, d’où elle vient, où vous l’avez vue, ce que vous aimez dans cette plante
La comparer avec une plante proche
La dessiner avec les noms des parties et colorier
Prendre une photo
Ecrire une fiche
La mettre dans un fichier botanique
Découper son ombre ou profil
Faire la fleur, la feuille en pâte à modeler
La planter en pot ou dans le jardin
Murielle
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